Carnaval


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Le Chêne de la Peur
La légende de Saint Georges

SORCELLERIE
Mariage

Charles Moiset a créé en 1885 une commission au sein de la Société des Sciences historiques et naturelles de l’Yonne pour retrouver usages, croyances et traditions. A la suite d’un questionnaire détaillé envoyé dans toute la région, en particulier aux instituteurs, un ouvrage a pu être réalisé, édité en 1888, réédité en 1982 par les éditions Jeanne Laffitte de Marseille. 200 communes de l’Yonne sont citées dans cet ouvrage dont certaines du canton de Quarré les Tombes.

La fête des rois, encore vers 1850, était l’ouverture de Carnaval. Bien que ce mot signifie, d’après Ducange, "chair s’en va" (carne-à-val), la perspective des privations qu’allait amener le carême était loin d’assombrir nos ancêtres. Tout au contraire, ils puisaient comme une exaltation de gaieté insouciante qui leur faisait prendre pour devise le carpe diem du sage Tibur. C’était alors que commençaient les mascarades, les batteries de tambour et autres réjouissances qui se continuaient jusqu’au mercredi des cendres. Durant tout ce temps, dans nos contrées, partout ou presque partout (villes et villages), des jeunes gens costumés et masqués se rendaient, par groupes de quatre ou cinq, dans des maisons où femmes et filles étaient réunies pour travailler et causer, autrement dit "faire la veillée". La venue des "masques", comme appelait ces groupes, était l’occasion de joyeusetés, de lazzis, d’ordinaire fortement épicés. La visite se terminait par des danses et des rondes.

Dans plusieurs pays on tenait à brûler Carnaval, que l’on considérait comme mort de sa belle mort. On se lamentait même de son trépas prématuré et l’on se répandait en cris et en pleurs sur son bûcher.

A Quarré les Tombes, on ne se contente pas d’un simple fantoche. Un jeune homme déguisé et masqué est étendu sur une paillasse et porté sur une civière par quatre de ses camarades. Deux autres jeunes gens faisant fonctions, l’un de prêtre, l’autre de marguillier, accompagnent le cortège. On promène ce Carnaval à l’agonie, suivant le mot local, dans toutes les auberges, où on lui administre comme cordial du vin blanc ou des liqueurs qui lui arrivent au moyen d’un entonnoir placé entre les lèvres du masque dont on l’a orné. On juge de ce que peut être l’état du malheureux à la fin de la tournée. Il subirait à coup sûr aussi passivement que ses Menechmes de paille le supplice auquel il a été condamné. On ne pousse pas, néanmoins, jusqu’à l’extrême, l’amour du réalisme ; quand vient le moment de l’exécution, on substitue subrepticement au patient un mannequin du genre de ceux qu’on emploie ailleurs.

L’incinération de Carnaval a lieu à une certaine distance des habitations. De l’endroit où a été prononcé le jugement à celui du supplice on se rend solennellement avec musique funèbre, tambours sans timbre exécutant une batterie d’enterrement. Dans le cortège les uns poussent des cris de vengeance et de haine ; les autres des gémissements de pitié, parfois même, comme à Quarré les Tombes, on chante en plus des litanies. Lorsqu’on est arrivé au lieu de l’exécution, on forme un bûcher composé de paille et de fagots. On dépose le condamné au faîte et l’on y met le feu. Tandis qu’il flambe, on danse en rond autour, puis, la flamme tombée, les plus hardis et les plus agiles sautent par-dessus le brasier.

Source : Les usages, croyances, traditions, superstitions de l’Yonne (Charles Moiset 1888)




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